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La guerre froide

Introduction

La Grande Alliance préservée à Yalta (février 1945), à Nuremberg (novembre 1945 - octobre 1946), et à propos des nouvelles frontières en Europe et en Palestine, se désagrège dès 1947 avec l'annonce quasi-simultanée des doctrines Truman pour les Etats-Unis et Jdanov pour l'URSS. Ces doctrines marquent l'avènement de la Guerre Froide qui va se maintenir jusqu'en 1962.

1 le grand schisme

1.1 L'escalade de la méfiance

Cette escalade est le fait de la combinaison de plusieurs facteurs :

L'endiguement américain au nom de la doctrine Truman

A travers la doctrine Truman, les Etats-Unis annoncent qu'ils s'engagent à aider financièrement et matériellement tout gouvernement qui lutte contre le communisme dans son propre pays. La doctrine Truman constitue donc la déclaration de guerre froide américaine. Elle trouve une application directe dans la guerre civile en Grèce et l'envoi d'argent et d'armes par les Etats-Unis aux royalistes grecs.

L'aide Marshall proposée dès juin 1947 est le prolongement de ce principe : par cette aide, les Etats-Unis entendent soulager la misère de l'Europe en ruines et ainsi endiguer l'expansion du communisme. Cette aide est refusée par l'URSS, l'Europe de l'Est et la Finlande.

La poussée soviétique en Europe Centrale

De son côté, l'URSS conforte ses positions en Europe Centrale. Les zones d'influence provisoires héritées de la Seconde Guerre Mondiale amènent en effet l'URSS à être présente en Roumanie, Bulgarie, Pologne et Hongrie. Les communistes, avec l'appui de l'URSS, y noyautent les fronts nationaux (stratégie du cheval de Troie), éliminent les autres partis (stratégie du salami) et évincent leurs chefs : c'est le cas de Mazaryk et Benès en Tchécoslovaquie (Coup de Prague, 1948). La Tchécoslovaquie devient ainsi la cinquième démocratie populaire, coulée dans le moule soviétique. Seules la Finlande et la Yougoslavie résistent à la satellisation. Les PC européens sont encouragés par le Kominform (créé en septembre 1947) à garder une ligne de conduite d'intransigeance.

1.2 La coupure du monde et de plusieurs Etats

La conséquence la plus visible de Guerre Froide est la constitution de deux blocs antagonistes autour de l'URSS et des Etats-Unis. Cette bipolarisation va se faire au détriment de l'unité de plusieurs Etats qui vont être eux aussi coupés en deux.

Le cas de l'Allemagne

A l'issue de la guerre, Berlin fait l'objet d'une occupation quadripartite. En 1948, les Alliés décident de mettre en circulation une nouvelle monnaie, le Deutschemark. L'URSS riposte en organisant le blocus de Berlin de juin 1948 à mai 1949. Berlin est sauvé de la famine par la mise en place par les Etats-Unis d'un pont aérien qui permet de ravitailler la ville. L'URSS est mise en échec et lève le blocus. Les alliés réunissent leurs zones d'occupation pour fonder la RFA en mai 1949, tandis que la zone d'occupation soviétique constitue la RDA en octobre 1949.

Le cas de la Chine

Le 1er octobre 1949, Mao Zedong profite des tumultes européens pour fonder la République Populaire de Chine qui sera désormais opposée à la Chine Nationaliste de Chiang Kai-shek qui se replie à Formose et obtient avec l'appui américain de garder le siège permanent au Conseil de Sécurité de l'ONU.

Le cas de la Corée

Au lendemain de la guerre, la Corée est divisée en deux Etats : au Nord du 38ème parallèle, le gouvernement communiste de Kim II Sung et au Sud, le gouvernement violemment anti-communiste de Syngman Rhee. Suite à l'invasion du Sud par les troupes communistes en juin 1950, la Corée du Sud en appelle à l'ONU pour régler cette agression caractérisée. L'intervention des Etats-Unis en tant que troupes mandatées par l'ONU ne suffit pas à contrebalancer l'envoi massif des "volontaires" de la Chine Populaire. La guerre de Corée se termine en 1953 par un retour au statu quo ante (armistice de Pan Mun Jom). C'est la première fois que les Etats-Unis participent à une guerre sans la gagner.

Le cas du Viêt-nam

Les Français perdent leur guerre de reconquête coloniale au Viêt-nam qui se termine par les Accords de Genève de 1954 qui scindent le pays en deux selon le 17ème parallèle. Le Nord du pays est dominé par le parti du Viêt-minh formé en 1941 par Ho Chi Minh et soutenu par l'URSS et la Chine.

2 L'équilibre de la guerre froide (1953-1956)

La densité moyenne de la population chinoise est très peu significative : en effet, il existe un contraste extrême entre les fourmilières humaines de la Chine orientale et la Chine désertique de l'Ouest (à l'ouest du 100ème méridien et au Nord).

2.1 Une courte détente

Elle est générée par les changements des chefs d' Etat soviétique et américain. En premier lieu, la mort de Staline le 05 mars 1953 ouvre en effet une période de relative détente entre les deux super puissances. La déstalinisation effectuée par Khrouchtchev (XXème Congrès du Parti Communiste soviétique en février 1956) remet en question l'hégémonie de l'URSS sur le monde communiste. Aux États-Unis, Eisenhower remplace Truman et met fin au maccarthysme.

2.2 Le renforcement des alliances

Cette période est également celle de la "Pax Americana" : les traités d'alliance ou de coopération se multiplient : on se souvient de l'OEA (Organisation des Etats Américains) en 1948, de l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord) de 1949, du traité de San Francisco avec le Japon en 1951, de la création de l'ANZUS (Australie, Nouvelle-Zélande, États-Unis) en 1951. D'autres traités prolongent encore ce réseau d'alliances tissé par les États-Unis : l'OTASE (Organisation du Traité de l'Asie du Sud-Est) en 1954, le Pacte de Bagdad en 1955 (Iran, Turquie, Pakistan, Irak et Royaume-Uni, mais auquel les États-Unis, s'ils ne sont pas signataires, ont pourtant participé de façon indirecte).

De son côté, le bloc Est se renforce également, notamment à travers la signature du Pacte de Varsovie en 1955 qui lie l'URSS aux cinq satellites d'Europe de l'Est et à la RDA.

2.3 La triple crise de 1956

Ces trois crises mettent fin à la période d'accalmie relative dans les relations internationales qu'avaient constitué les années 1953 à 1955. Elles démontrent la faible marge de manœuvre dont disposent les petites puissances par rapport aux deux supergrands.

La crise de Suez

En 1956, Nasser, chef d'Etat égyptien depuis son coup d'Etat de 1954, décide de nationaliser le canal de Suez, sans indemnités pour ses actionnaires français et anglais. Les Anglais et Français, alliés aux Israéliens, entrent donc en conflit avec l'Égypte qui subit une déroute militaire. Mais l'URSS se pose en arbitre et menace d'avoir recours à l'arme nucléaire contre les adversaires de l'Égypte. Ceux-ci cherchent le soutien des États-Unis qui ne le leur accorde pas. Français et Anglais doivent donc se retirer. La preuve est donc faite que les puissances moyennes ne peuvent agir en dehors du bloc occidental.

La crise polonaise

En juin 1956, des émeutes éclatent suite à la déstalinisation. Les Polonais demandent une liberté d'expression plus grande. La libération de Gomulka suffit à calmer les esprits. Il prend la tête du gouvernement.

La crise hongroise

Le même type de manifestations qu'en Pologne éclatent en Hongrie. Mais la présence de gouvernants staliniens au pouvoir donne un caractère beaucoup plus grave aux émeutes. La libération de Nagy et Kadar ne suffit pas à apaiser les émeutes qui prennent dès lors un caractère anti-communiste. L'insurrection est écrasée dans le sang par les chars soviétiques. L'intervention de l'armée soviétique contre la révolution hongroise à Budapest en 1956 montre le caractère violent de la répression soviétique et marque le début du déclin de l'influence du Parti Communiste dans le monde intellectuel. Elle montre également les limites très étroites de l'autonomie au sein du bloc Est.

2.4 La bipolarisation en question

Une partie du monde commence à échapper de la sphère d'influence des deux blocs. En effet, les indépendances en Asie et en Afrique font naître un troisième monde dont l'émergence transforme les relations internationales.

La conférence de Bandoeng (avril 1955)

Cette conférence internationale à laquelle ne participent ni les États-Unis ni l'URSS a justement pour objet de définir la position de ces nouveaux pays qui apparaissent sur le globe. Le premier ministre chinois Zou Enlaï invité à la Conférence va en fait en être un des protagonistes majeurs puisqu'il va énoncer dix propositions qui condamnent le colonialisme. La conférence est également l'occasion de réaffirmer la souveraineté de ces Etats qui n'ont pas à accepter les diktats des États-Unis et de l'URSS. Cette conférence constitue donc la profession de foi du non-alignement. Ces pays n'ont pas de poids économique ou politique mais un poids démographique. C'est là qu'apparaît donc la notion de Tiers Monde par référence au Tiers Etat.

La réhabilitation de Tito

Le leader yougoslave mis au ban du bloc communiste par l'URSS en 1948 pour condamner sa volonté d'indépendance et d'autonomie est réhabilité en 1955. Pour montrer sa volonté de réconciliation avec le leader yougoslave, l'URSS dissout le Kominform dont Tito avait été exclu. C'est une victoire importante pour un des grands leaders du non-alignement.

3 La coexistence pacifique (1957-1962)

La fin de la Guerre Froide est marquée par deux éléments majeurs : d'une part, l'accentuation de la volonté d'indépendance et d'autre part, l'équilibrage des forces des deux supergrands.

3.1 Deux blocs moins monolithiques

Les alliés des deux blocs aspirent de plus en plus à l'indépendance.

La CEE (traité de Rome, 25 mars 1957)

Les États-Unis avaient été à l'origine de la cohésion européenne avec la création de l'OECE. Or, les pays européens souhaitent aller plus loin : ils voient dans la coopération économique le moyen de rétablir en Europe une zone de paix. La cohésion doit commencer par la solidarité économique. C'est pourquoi dès 1951 ils créent en dehors de la tutelle des Etats-Unis, la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) qui sera effective en 1952. Les six pays fondateurs (la France, la RFA, l'Italie et les trois pays du Benelux auront désormais une politique économique commune concernant le charbon et l'acier. L'idée européenne est relancée avec la création de la CEE, Communauté Economique Européenne par le traité de Rome en 1957.

Le marché commun doit constituer la première étape avant la création d'une zone de libre échange. La CEE devient donc une déclaration de concurrence économique par rapport aux États-Unis. Avec la mise en place de la PAC (Politique Agricole Commune) en 1962, l'agriculture européenne devient le concurrent direct des États-Unis. Par conséquent, alors que sur le plan militaire, le bloc occidental reste soudé, la fissure Etats-Unis / Europe provient de l'économie.

La rupture sino-soviétique

Au sein du bloc communiste également, des failles se font sentir. Un certain nombre d'oppositions apparaissent entre l'URSS et la Chine. En premier lieu sur la doctrine : les Chinois voient d'un mauvais œil la déstalinisation menée en URSS et en Europe de l'Est. Deuxième point de désaccord : les modalités de développement du Tiers Monde. La Chine Populaire a joué un rôle majeur à la conférence de Bandoeng à travers la personne de Zou Enlaï et défend que le communisme agraire chinois est plus adapté aux pays sous-développés du Tiers Monde. Opposition également sur la politique à mener vis-à-vis des États-Unis : les Chinois entendent soutenir militairement tous les pays qui luttent contre l'impérialisme américain (exemple de la Corée). L'URSS apparaît beaucoup plus modérée en la matière par peur des représailles nucléaires. L'ensemble de ces désaccords entraînent le départ des Soviétiques de la Chine où ils dispensaient une assistance technique importante. C'est une catastrophe économique pour la Chine qui souffre déjà de l'échec constituent les Communes Populaires. La rupture sino-soviétique est consommée avec le départ des Chinois du XXIème Congrès du Parti Communiste en 1961.

La première conférence du non-alignement

Elle se déroule à Belgrade en 1961 et confirme l'existence d'une troisième voie entre les deux blocs.

3.2 L'équilibre de la terreur

Il conditionne largement la coexistence pacifique. Les deux supergrands sont désormais d'autant plus disposés à adopter un langage commun qu'ils savent qu'une guerre entre eux générerait leur destruction mutuelle. En effet, en 1957, l'URSS lance le Spoutnik, premier satellite envoyé dans l'espace. Ce lancement montre que l'URSS est désormais en mesure d'atteindre le territoire américain avec ses fusées.

Pourtant, cet équilibre des forces entre les deux supergrands n'aboutit pas instantanément à la coexistence pacifique. Il faudra encore deux crises majeures dont une a fait trembler le monde pour qu'elle soit vraiment amorcée.

3.3 Le mur de Berlin

Cette première crise a lieu en août 1961. Khrouchtchev qui dirige alors l'URSS décide de la construction d'un mur entourant Berlin Ouest. Tout mouvement de population entre les deux Allemagne est désormais impossible. Or, les États-Unis ne réagissent pas, Kennedy se rend à Berlin pour assurer les Berlinois de sa solidarité mais aucune mesure de représailles n'est adoptée. D'où deux possibilités : soit l'Europe n'est plus un enjeu stratégique majeur, soit le risque de guerre totale est tellement grand que toute réaction est rendue impossible.

3.4 La crise des fusées

En 1962, Fidel Castro crée à Cuba le premier régime communiste en Amérique. Il demande le soutien des Soviétiques qui installent sur l'île des missiles, provoquant un affrontement grave avec les États-Unis. Menacés, les États-Unis répliquent par la mise en quarantaine de Cuba et reçoivent l'appui de tous leurs alliés. L'Occident reforme l'espace de la crise un bloc monolithique derrière les États-Unis. L'URSS doit céder et démonte les rampes de lancement sous la tutelle de l'ONU.

Conclusion

Cette crise met en lumière le risque réel d'affrontement nucléaire entre les deux supergrands. A ce titre, elle constitue le paroxysme de la Guerre Froide, mais elle en est également le dénouement. L'heure est désormais à la Détente entre les deux supergrands.

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