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Delie

Délie est le chef-d’œuvre de Maurice Scève, qui naquit vers le début de ce siècle, et mourut vers 1562. Maurice Scève est issu d’une riche famille bourgeoise de Lyon. En 1536, avec son blason* du Sourcil, il remporte le concours poétique proposé par Marot. De sa liaison platonique avec la poétesse Pernette du Guillet, il tire l’admirable Délie. En 1547, il publie une églogue*, la Saulsaye, puis un poème cosmologique, Microcosme.

Délie est un recueil de 450 poèmes organisés selon une savante architecture chiffrée dont la formule est : 1 + 5 + (9 x 49) + 3, c’est-à-dire un huitain liminaire, cinq dizains, quarante-neuf fois neuf dizains encadrés par cinquante emblèmes, puis encore trois dizains. Cette composition arithmosophique, c’est-à-dire selon la science mystérieuse des nombres, illustre les étapes mystiques d’une initiation amoureuse, dont le recueil seul livre la clef.

Ce recueil s’inscrit dans la tradition du Canzoniere du poète italien Pétrarque, qui chantait son amour passionné pour Laura. Scève choisit d’exalter son amour pour Délie, dont le nom renvoie à la déesse de Délos, Artémis, divinité lunaire, à moins que ce ne soit l’anagramme de l’idée, puisque « parfaicte au corps, et en l’âme accomplie », Délie est bien sûr l’idéal de la femme selon le poète. Les poèmes sont accompagnés d’emblèmes, images assorties d’inscriptions, qui rythment le recueil.

Éminent représentant de cette école lyonnaise de poésie, Maurice Scève recueille les traditions de l’hermétisme antique, l’allégorisme médiéval et du néo-platonisme renaissance, pour créer une poésie où les symboles et la magie créent un mystère sublime et opaque. L’intensité de la passion brûlante et douloureuse au sein d’une forme contrainte et parfaite, dix vers de dix syllabes, transforme la Dame en « constituée Idole de ma vie ». Une rhétorique* complexe, une syntaxe elliptique, une préciosité exigeante, un lyrisme symboliste, un art consommé de la pointe* sont autant de caractères qui ne suffisent pas à rendre compte de la rare beauté de ces poèmes, que Mallarmé seul a su retrouver dans ses vers.

Mais comme Lune infuse dans mes veines
Celle tu fus, es, et seras DELIE,
Qu’amour a joinct à mes pensées vaines
Si fort, que Mort jamais ne l’en deslie.

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