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Charles Baudelaire

1:Vie de Charles Baudelaire

Orphelin de père à six ans, Charles Baudelaire déteste le nouvel époux de sa mère, le commandant Aupick. Mis en pension au lycée Louis-le-Grand, cet adolescent révolté et mélancolique s’intéresse bientôt à la littérature. Il abandonne ses études de droit, et fréquente plus volontiers la bohème romantique du Quartier Latin. En 1841, il embarque sur le « Paquebot des mers du Sud » qui le conduit jusqu’à l’île Bourbon, aujourd’hui, la Réunion. De là les rêveries marines et les paysages ensoleillés qui font l’exotisme de quelques-uns de ses poèmes.

À son retour, il prétend vivre de manière autonome, grâce à son héritage. Il s’éprend de la mulâtresse Jeanne Duval, la Vénus noire qui traverse ses vers et sa vie de manière orageuse, et il mène une vie de dandy*, élégance supérieure des jeunes gens à la mode de l’époque. Mais la famille lui impose un conseil judiciaire, qui le réduit à une rente humiliante. Il doit alors travailler, s’engage dans la critique d’art et dans la critique littéraire. Les Salons et articles qu’il produit révèlent un esprit éclairé, un esthète avisé.

Les rencontres amoureuses ou artistiques forment son génie : l’actrice, Marie Daubrun, et la lumineuse Mme Sabatier enrichissent son expérience. Par ailleurs, il découvre dans la prose américaine d’Edgar Allan Poe, qu’il traduit et révèle au grand public, une âme fraternelle. Son grand projet poétique aboutit, en 1857, au recueil des Fleurs du mal. L’auteur est traduit en correctionnelle pour immoralité. Tandis que Flaubert, poursuivi également pour sa Madame Bovary, finit par gagner son procès, Baudelaire est condamné.

Cette épreuve, quoiqu’il continue à écrire, l’accable. La maladie aussi, d’ailleurs, et il s’enfonce désormais dans une solitude vaguement éclairée par l’opium et le haschich, ses Paradis artificiels. Après les Petits Poëmes en prose, publiés à partir de 1862, il entend donner en Belgique une série de conférences, mais une attaque à Namur le laisse paralysé et aphasique en 1866. Transporté à Paris, il meurt l’année suivante.

2:Modernité de Baudelaire

La modernité poétique de Baudelaire, le mot est à l’époque tout nouveau, réside dans cette synthèse heureuse qu’il propose en son art. Il reprend des éléments de l’héritage classique, essentiellement l’alexandrin, le quatrain, le sonnet*, et la métrique en général. Il s’apparente aux romantiques par cette mélancolie coutumière, sa passion de l’art, de l’amour et de l’ailleurs : « N’importe où, pourvu que ce soit hors du monde », écrit-il désespéré. Il se rapproche aussi du formalisme, tant il accorde d’attention à la forme rigoureuse de ses vers, et son culte de la Beauté fait de lui le digne émule de Théophile Gautier, à qui il dédie d’ailleurs ses Fleurs du mal. Enfin, il annonce le symbolisme* par son intuition des correspondances entre les sensations, entre l’homme et l’univers aussi. Il entrevoit également des correspondances entre les arts, et, grâce à ses articles lumineux, il explique à ce siècle bourgeois la nouveauté et la grandeur artistiques de peintres tels que Delacroix, Courbet, Manet, et du compositeur Richard Wagner.

Baudelaire est donc une synthèse paradoxale des courants littéraires ou artistiques qui l’ont suivi, précédé ou traversé : il est pour ainsi dire le carrefour de ce siècle. Pour autant, il a su conserver toujours cette manière si personnelle, et si originale, ce qu’il convient d’appeler style. Pour Baudelaire, « la modernité, c’est le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable. » Ce sont en effet deux tendances de son œuvre qu’il allie de manière curieuse. Le chantre de la Beauté éternelle a aussi évoqué les impressions fugaces que lui suggèrent les tableaux parisiens, lors de ses promenades, et même les plus laides.

Un dernier trait fait la modernité de son œuvre : laissant à d’autres le ciel, la nature et les petits oiseaux, Baudelaire cherche son profit poétique dans les terrains vagues et maudits de Lesbos, de la drogue, de la grimace, du remords, des épaves et de l’enfer, pour en tirer une splendeur ambiguë, et d’autant plus séduisante... Rimbaud, Verlaine, les surréalistes et Jean Genet sauront s’en souvenir.

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